Université Jean Moulin Lyon 3 - Faculté de Droit

Assises Françaises d’Étude du Wargaming

L’Institut d’études de stratégie et de défense (IESD) a le plaisir de vous inviter à la première édition des Assises Françaises d’Étude du Wargaming (AFEW), qui se tiendront les 29 et 30 avril 2024, à l’Université Jean Moulin Lyon 3.

Le regain d’intérêt pour l’objet et sa méthode est majeur en France : l’objectif de cette rencontre est de lancer une dynamique de réflexion collective sur le wargaming, afin de poser les bases collaboratives d’un réseau d’échanges, et favoriser la connaissance des travaux de chacun des acteurs de cette sphère de réflexion, de connaissance et d’action.

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Compte-rendu de l’événement

Les wargames ne cessent de croitre en popularité, après une disparition de plus de quarante ans dans les débats stratégiques en France ils font désormais partie des buzz words. Pourtant, leur pratique professionnelle reste dispersée au sein de l’hexagone, et les publications sur le sujet sont rares surtout en comparaison de la masse des productions anglosaxonnes. Les Assises Françaises d’Etude du Wargaming ont apporté la première pierre à l’édifice souhaitant répondre à ces problématiques.

« De quoi parle-t-on ? »  

De l’intérêt de conduire des Assises du wargaming

Lorsque l’on se penche sur les événements de recherche dédiés au wargaming outre atlantique l’on est à la fois frappé par leur nombre et leur régularité. Faire des wargames, revient ainsi non-pas seulement à créer des jeux mais bien à penser leur emploi au service d’objectifs professionnels (formation, études prospectives, aide à la planification, tests de concepts, etc.), et de ce fait implique une recherche dédiée à leur développement et à la compréhension de cet objet méthodologique.

Les Assises Françaises d’Etude du Wargaming ont été construites dans un but similaire. Il s’agit de pouvoir traiter en France du wargaming comme une discipline, c’est-à-dire un objet de recherche avec ses concepts, ses méthodes, ses débats et cadres théoriques, mais également ses pratiques et leur analyse. Un point de vue unanimement reconnu mais qui ne disposait pas en France de cadre d’expression, et surtout d’un point de convergence entre les divers professionnels (théoriciens et praticiens) civils et militaires des wargames et du wargaming.

L’ambition de cet événement était ainsi d’offrir un point de réunion des acteurs majeurs en France du wargaming, mais aussi et surtout de pouvoir traiter en profondeur de cet objet, ce qui explique le format d’Assises et non-pas seulement d’un colloque thématique.

Un événement majeur à dimension internationale

Pour ce faire, il fallait pouvoir réunir les principaux acteurs du wargaming professionnel en France, mais également pouvoir conduire des débats de référence sur l’ensemble des thématiques structurantes. L’événement, construit sur deux jours a voulu répondre à ces objectifs au travers d’un programme ambitieux présentant six tables rondes thématiques et deux keynotes concluant chaque journée. Le wargaming étant par ailleurs une méthodologie pratique, ces journées de débats théoriques ont été suivies de démonstrations dynamiques présentant des créations civiles et militaires de wargames.

Les débats, bien que centrés sur la vision française du wargaming, ont inclus des intervenants étrangers, avant tout européens, mais également américains, pour développer une communauté d’intérêts entre leurs pratiques et les nôtres.

Compte-rendu des échanges : débats méthodologiques et étude de l’emploi au sein des armées françaises

Les propos liminaires et l’introduction des tables rondes ont porté une première définition du wargame et du wargaming, et l’inscription de ces derniers dans le cadre de la recherche universitaire et le champ des études stratégiques. Si la guerre n’est pas un jeu, l’appréhender au travers du jeu et en particulier de son utilisation méthodologique est un atout indéniable pour en comprendre les déterminants, adapter les processus de formation ou encore enrichir les méthodologies pratiques d’études prospectives.

Premier jour : le wargaming comme méthodologie

En approfondissement des propos introductifs, les tables rondes du premier jour se sont concentrées sur l’objet et l’étude de son cadre théorique transdisciplinaire.

Les premières réflexions ont porté sur l’histoire et la méthodologie du wargaming, en insistant sur la différence entre le moyen (le wargame) et son emploi méthodologique (le wargaming), ce dernier étant par essence ce qui fait des wargames un emploi professionnel et non un simple hobby. Les intérêts et limites ont également été évoqués, rappelant l’outil formidable de formation et de compréhension qu’est le wargaming, tout en insistant sur les biais de conception et le danger d’en faire un outil prophétique alors qu’au contraire il ne vise qu’à interroger. Enfin, ces dimensions théoriques ont été appliquées au cas d’étude du fait nucléaire militaire et de l’évolution de l’apport du wargaming à ce propos durant la Guerre Froide puis désormais au « troisième âge nucléaire ».

Une deuxième table-ronde a pour sa part traitée de la culture stratégique sous l’angle du wargaming. Il s’agissait ainsi de déceler l’influence de la culture stratégique d’un acteur sur l’emploi du wargaming et sa place institutionnelle, au travers deux présentations, celle du lieutenant-colonel Augustin Lefort, stagiaire à l’Ecole de Guerre et président du comité wargame nouvellement institué, et Mark Joergensen, wargamer au Royal Danish Defence College. Par la suite, a été exposée une analyse portant cette fois sur la question de l’existence de cultures stratégiques au sein même du wargaming, avec l’étude de sa diffusion mondiale et de cas décentrés, tel que son emploi en Chine.

 

Photo : Table-ronde 2 : le wargaming et les cultures stratégiques

Par la suite, une troisième table ronde a soulevé la nature transdisciplinaire du wargaming, notamment au travers son emploi au sein des sciences de gestion ou encore au prisme de la science politique. L’occasion également d’aborder le rapport entre wargaming et intelligence artificielle, notamment sur les apports de cette dernière dans la création, la conduite, mais surtout l’analyse des wargames.

Pour conclure, la journée s’est achevée avec une Keynote du Captain Louis M. McGray, vice-président de la chaire wargaming au sein de l’US Naval War College, portant sur l’emploi du wargaming dans la pensée stratégique et la formation des officiers dans la l’US Navy. Une intervention permettant de comparer les pratiques françaises et américaines sur le sujet.

Deuxième jour : typologies du wargaming et étude de cas aux armées françaises

Pour sa part, le second jour de cette première édition des Assises Françaises d’Etude du Wargaming s’est concentré sur les dimensions pratiques de réalisation et d’emploi des wargames professionnels.

La première table ronde a de ce fait présenté des approches alternatives du wargaming, comme leur emploi non-militaire en particulier dans la gestion de l’incertitude et des crises nationales, ainsi qu’un focus sur l’importance du storytelling et d’autres moyens de réaliser des mises en situation (méthode des scénarios, brainstorming). L’enjeu étant de démontrer la pluralité de l’emploi du wargaming mais également sa complémentarité avec les autres outils des études prospectives et pratiques.

Photo : Table-ronde 4 : Faire du wargaming – approches alternatives

La deuxième table ronde, revenait au cœur historique de l’emploi des wargames professionnel en ouvrant le premier volet de l’étude de cas thématique de cette édition des assises : le wargaming militaire. Il s’agissait alors de s’intéresser à leur usage dans le cadre de la production des doctrines et de la pensée stratégique. Des interventions des trois armées (terre, air, mer) ont ainsi présenté la place et le rôle des wargames dans ces institutions en France. L’ultime intervention de cette table ronde, portant sur la constitution de wargames Multi-Milieux/Multi-Champs (M2MC), a démontré toute la complexité de ce type de modélisation et en particulier à cerner la réalité des opérations multidomaines dans le construction et l’analyse de wargames.

Concluant ce cycle de tables rondes, la dernière a présenté le second volet du wargaming militaire au travers de son emploi dans les études et développements technico-industriels. Au travers de réflexions sur les cycles d’innovation, le Colonel Sébastien de Peyret a ainsi présenté les enjeux du wargame et son emploi dans pour les institutions et armées françaises, notamment au sein de l’Agence d’Innovation de Défense. Une intervention complétée par un retour d’expérience du Naval Innovation Hub de Naval Group sur leur usage du wargame dans la prospective technologique et leurs contraintes industrielles.

En clôture de cette seconde journée, et plus globalement de cette édition des assises, une keynote a présenté la vision française du wargaming comme une voie d’avenir aux nombreux défis, apte à les relever, notamment du fait d’une communauté de professionnels en cours de constitution.

Photo : Keynote conclusive de Patrick RUESTCHMANN, Sous-directeur wargaming au
Centre interarmées de concepts, de doctrines et d’expérimentations (CICDE)

 

Enseignements et postérité de cette première édition

Un acte fondateur réussi 

Cette première édition des assises est indéniablement une réussite. Les objectifs de réunir les divers acteurs professionnels français sur le sujet, et de porter un événement de référence sur l’étude de cet objet méthodologique, ont été remplis.

Ainsi, la convergence espérée des acteurs du wargaming en France et leur participation à des études transdisciplinaires portant sur les cadres théoriques, les méthodes et pratiques de cet objet ont bien eu lieu. L’acte fondateur espéré a été réalisé, il s’agit désormais d’en assurer la pérennité.

Des suites des assises : une pérennisation entamée 

A ce titre, deux voies de continuation ont d’ores et déjà été instituées.

1° La première qui vise à assurer la pérennité institutionnelle de ces assises, et à l’instar des disciplines précédemment évoquées (sociologie et science politique), s’incarne dans la création – en cours – de l’Association Française d’Etude du Wargaming, pilotée par les fondateurs des assises et dont le fonctionnement et le fond seront assurés par un comité scientifique étendu, constitué des acteurs majeurs du wargaming en France. Pensée dans une composition pluridisciplinaire, liant autant civils que militaires, universitaires, acteurs privés et publics, cette association et son comité scientifique auront vocation à préparer les prochaines éditions des assises mais également à faire vivre la communauté française du wargaming grâce au point de convergence ainsi créé.

2° La seconde voie de pérennisation est celle de la réalisation d’une publication française de référence sur le wargaming. Prolongeant les présentations et débats des assises, enrichies de publications issues d’un appel à contribution, elles devront poser un cadre de référence après chaque édition des assises. La première étape de cette ambition sera concrétisée dès septembre prochain avec la parution d’un double numéro de la revue Stratégique dédiée à ce sujet, proposant plus de vingt articles scientifiques sur le wargaming.

In fine, un acte fondateur a été posé. La communauté française du wargaming a convergé pour conduire une étude pluridisciplinaire sur son objet et produire une réflexion française de référence. Première étape à la réussite indéniable, il s’agit désormais de la consolider, par des événements réguliers mais également des publications structurantes. Gageons que ce défi saura être relevé.


Photos des expositions dynamiques et échanges informels

Le programme

Les interventions de Mark JØRGENSEN, Rex BRYNEN et de l’US Naval War College se tiendront en anglais, tandis que le reste du programme se déroulera en français. 

Retrouvez ci-dessous la programmation détaillée, à télécharger :
Dépliant AFEW